La Puce à l'oreille, de Georges Feydeau. Mise en scène Lilo Baur. Salle Richelieu du 21 septembre 2019 au 23 février 2020.
Pour un homme avouant être devenu auteur de comédies « par paresse simplement », la production de Georges Feydeau (1862-1921) est étonnante, comme l’est toujours aussi l’œuvre comique d’un artiste réputé taciturne.
Feydeau auteur naît à « six ou sept ans », en 1869 :
Un soir, on m’emmène au théâtre […]. Je revins enthousiasmé […]. Le lendemain, après n’en avoir pas dormi de la nuit, dès l’aube, je me mis au travail. Mon père me surprit. Tirant la langue et, d’une main furieuse décrêpant mes cheveux emmêlés par l’insomnie, j’écrivais une pièce, tout simplement.
Georges Feydeau
Dès l’âge de quatorze ans, il sera propulsé dans des cercles où il expérimentera le théâtre comme auteur et comédien. Au cours de ses études secondaires abandonnées en 1878, il se révèle toujours plus passionné par l’écriture et le théâtre. Dès 1876, il songe à cofonder le Cercle des Castagnettes, association d’amateurs organisant des représentations et concerts. Dans les salons et soirées mondaines, la mode est au monologue comique, depuis Le Hareng saur de Charles Cros en 1877. Feydeau voit dans l’écriture de ce genre littéraire affranchi de contraintes stylistiques et scéniques, la possibilité de se faire connaître. La Petite Révoltée, monologue en vers au ton enfantin et humoristique, est remarquée et éditée en 1880.
À vingt ans, entre 1882 et 1883, il se lance dans l’écriture de courtes pièces, dont la saynète comique en un acte Par la fenêtre sur la faiblesse d’un homme tyrannisé par les femmes. Encouragé dans sa lancée, il présente dans les cercles, Amour et piano et Gibier de potence, « comédie bouffe » sous influence labichienne. Quiproquo reposant sur la méprise des personnages, Amour et piano est particulièrement apprécié pour son sens de la théâtralité et l’habilité des dialogues. Pas plus que les études, le service militaire n’interrompra son écriture. Exécuté à partir de 1883, il lui inspire au contraire des monologues (Les Célèbres, Le Volontaire) et ses prochains triomphes. Ses pièces s’étoffent de quelques actes, comme Tailleur pour dames, vaudeville en trois actes, et croquent, dans Champignol malgré lui, la vie de caserne.
À son retour du service militaire, Feydeau devient secrétaire général du Théâtre de la Renaissance entre 1884 et 1886. Dans ce théâtre est créé, en 1886, Tailleur pour dames, son premier mais éphémère grand succès. La Lycéenne (1887), Un bain de ménage (1888), Chat en poche (1888), Les Fiancés de Loches (1888) écrite pour la première fois avec Maurice Desvallières, L’Affaire Edouard, et, dans une moindre mesure, Le Mariage de Barillon (1890) ne remportent pas l’adhésion du public et de la critique, probablement déçus par des caractères moins vraisemblables et un enchaînement des péripéties plus maladroit que dans Tailleur pour dames. Des problèmes financiers le contraignent à écrire tandis que sa tentation et tentative de vivre de l’interprétation théâtrale s’évanouit. Le confort matériel viendra en octobre 1889, lorsqu’il épouse Marianne Carolus-Duran, la fille du célèbre peintre dont l’aisance financière permet à Feydeau de poursuivre sereinement son activité d’écrivain.
En 1892, le vent de la gloire se met soudainement, et durablement, à souffler. Monsieur chasse, Champignol malgré lui et Le Système Ribadier font résonner d’éclats de rire et d’applaudissements les théâtres de la Renaissance, des Nouveautés et du Palais-Royal. Le triomphe de Champignol s’explique surtout par la description farcesque de la vie de caserne. Pour Le Système Ribadier, Feydeau a puisé son inspiration dans les salons où était pratiqué l’hypnotisme étudié par Charcot et qui sert ici de toile de fond à ses observations sur le monde bourgeois.
Dans ces grandes comédies et les suivantes écrites de 1894 à 1908, Feydeau renouvelle le vaudeville où la démesure et la folie teintées d’étrangeté nourrissent des intrigues savamment complexes. Il livre sa recette de chimiste au sang-froid :
J’introduis dans ma pilule un gramme d’imbroglio, un gramme de libertinage, un gramme d’observation. Je malaxe, du mieux qu’il m’est possible, ces éléments.
Georges Feydeau
Un fil à la patte, traitant de la promotion sociale et première comédie conjugale écrite deux mois après son mariage, se rattache à la thématique récurrente de l’adultère déjà traitée dans ses comédies de jeunesse. Bourgeois et aventurières semblant sortis des cafés parisiens peuplent ses pièces où infidélité et cupidité traduisent, sans forcément la juger, la médiocrité humaine. Ainsi, les chassés-croisés amoureux brouillant les limites sociales entre bourgeois et modestes gens mis en scène dans L’Hôtel du Libre-échange (1894). La création du Dindon (1896), construit comme Un fil autour d’un deuxième acte délirant sur le mariage, est accompagnée de celle de courtes pièces puis d’un nouveau triomphe : La Dame de chez Maxim. Le restaurant Maxim’s fondé en 1893 où Feydeau a l’habitude de dîner, après un apéritif au Café Napolitain, appartient ainsi à l’histoire littéraire depuis 1899. La Môme Crevette, première « cocotte » érigée en rôle principal et interprétée par Armande Cassive, fait du spectacle au Théâtre des Nouveautés, une étape obligée pour les touristes de passage à Paris. Grand amateur d’art, il doit pourtant se résigner à vendre une partie de sa collection pour rembourser des dettes contractées depuis le succès de La Dame de chez Maxim. Un mauvais placement financier conjugué à une fuite dans le jeu et les plaisirs entraînent Feydeau dans une course à l’écriture puis au divorce, contrariant ses aspirations à la peinture. Après La Dame de chez Maxim, sont créées, entre autres, La Duchesse des folies bergères (1902, suite de La Dame de chez Maxim en cinq actes), La Main passe (1904), La Puce à l’oreille (1907) et Occupe-toi d’Amélie (1908) qui témoignent toujours autant, par le détail des descriptions et annotations, de son attention à la mise en scène. Un an après, en 1909, Feydeau quitte son épouse pour s’installer à l’Hôtel du Terminus, avant la prononciation du divorce en 1916.
Photographie de répétition de La Puce à l’oreille, mise en scène Lilo Baur © Brigitte Enguérand
Peut-être les déboires de la vie conjugale relatés dans les cinq courtes pièces écrites entre 1908 et 1916 et rassemblées sous le titre Du mariage au divorce, doivent-ils leur amertume à la vie personnelle de l’auteur. Les sujets de dispute ne manquent pas : des retours trop tardifs (Feu la mère de madame, 1908), la difficile éducation des enfants (On purge bébé, 1910), l’indécence vestimentaire féminine en société (Mais n’te promène donc pas toute nue, 1911), la venue au monde d’un enfant (Léonie est en avance, 1911), et l’aigreur d’une épouse (Hortense a dit : « Je m’en fous ! », 1916). Des ébauches de pièces resteront inachevées, de grands succès sont adaptés dès 1913 par le cinéma muet, et après Hortense a dit en 1916, il se consacre surtout à la lecture et la peinture.
La syphilis emportera le 5 juin 1921 le dramaturge-né qui hésita, enfant, avec une carrière de comédien puis, adulte, celle de peintre. Le destin s’est donc acharné, faisant de ce Monsieur qui n’aimait pas écrire, le plus grand vaudevilliste.
Florence Thomas
Archiviste-documentaliste à la Comédie-Française
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